Joueb.com
Envie de créer un weblog ?
ViaBloga
Le nec plus ultra pour créer un site web.
Débarrassez vous de cette publicité : participez ! :O)
 
Retour à la page principale

De nos jours, les sources d'informations sont d'une abondance considérable. Néanmoins, leur fiabilité laisse souvent à désirer. Ce blog a donc pour vocation de combler cette brèche en proposant des articles écrits par des journalistes consciencieux, sérieux et désireux de donner une information de qualité.

Session
Nom d'utilisateur
Mot de passe

Mot de passe oublié ?

L'incendie

En août 2003, j'étais animateur en centre de vacances et de loisirs pour la première fois. Ce séjour s'est déroulé dans un châlet, en Haute-Savoie, et accueillait une trentaine d'enfants. Un soir, un incendie s'est déclaré dans un châlet voisin.
Des langues de flammes jaunes se tordaient et léchaient le ciel. Peu à peu, ce brasier infernal se rapprochait, faisant entendre de formidables bruits d'explosion de troncs d'arbres... Et patati et patata !
Non, en fait, je n'ai rien vu de tout ça. Je n'ai même pas vu une seule flamme. Evidemment, il y en avait ! Cette vilaine fumée noire nous l'a vite fait comprendre...

Nous avions fini le dîner et nous jouissions de la fraîcheur de ce début de soirée, un peu avant la veillée. J'étais alors en train d'animer un temps de chants avec quelques enfants. Soudain, une gamine a demandé à une animatrice : "C'est normal, cette fumée derrière le châlet ? Il n'y aurait pas le feu par hasard ?" A ce moment-là, j'ai pensé : "Quelle imagination, ces enfants ! C'est tout simplement un mec qui se fait griller des saucisses." Néanmoins, l'animatrice a préfèré aller vérifier. Un vent de panique a envahi peu à peu les enfants qui échaffaudaient diverses hypothèses au sujet de la provenance de la fumée.
Peu après, l'animatrice est revenue en courant et s'est écriée : "Ça a l'air sérieux ! Le châlet d'à côté brûle. Les pompiers sont sur la route !" La directrice de la colonie a vite donné les consignes. Le châlet, étant en bois, ne devait rester occupé en aucun cas. Tout le monde en a été évacué. Les enfants ont été regroupés au fond de l'étendue d'herbe servant habituellement d'aire de jeu. Tous les sacs de couchage ont été réquisitionnés, étant donné que l'incendie pouvait durer longtemps et qu'il commençait à faire froid.

Mais, il me semble que je suis en train de m'égarer en de fastidieuses descriptions de faits qui ne sont pas forcément intéressants. Ce n'est pas là où je veux en venir...

Certains enfants pleuraient, notamment les filles les plus âgées. Les garçons, eux, tentaient d'échapper à notre vigilance pour s'isoler du groupe afin d'apercevoir quelques flammes. Moi, je jouais de la guitare pour détendre l'atmosphère. J'ai entonné gaiement "Ne sens-tu pas claquer tes doigts ?" Non sans une certaine déception, j'ai constaté que j'étais le seul à chanter et que tous les enfants avaient les yeux rivés vers cette menaçante fumée noire qui ne cessait d'approcher. Arrivé au deuxième couplet qui fait "N'attends pas que le feu soit mort...", la cuisinère de la colonie m'a gentiment fait comprendre que je pouvais m'arrêter là. C'est ce que j'ai fait, vexé comme un pou.
A priori, nous ne risquions absolument rien. Les pompiers étaient sur place et commençaient à maîtriser le feu. Il y avait, cependant, quelque chose d'assez embêtant pour nous tous : la vilaine fumée... En effet, celle-ci, à cause du vent, arrivait jusqu'à nous. Je n'ai pas de connaissances médicales (bien que j'ai tenté le concours de PCEM 1, mais ça c'est une autre histoire) mais je peux vous dire que cette fumée donne soif, entraîne des difficultés à respirer et est très désagréable. De plus, certains des enfants que nous avions en charge étaient asthmatiques. Nous autres, animateurs, avons donc procédé à une distribution d'eau. Les enfants étaient alors tous dans leur sac de couchage, la nuit étant arrivée avec le froid. Cette distribution permettait aussi de rassurer les enfants qui avaient, avant tout, besoin qu'on leur parle.

Mais, il me semble que j'arrive bientôt au terme de mon article. Il ne reste plus que le moment le plus important à raconter. C'est également celui qui m'a le plus touché...

"Qui veut de l'eau ?" demandais-je. A ce moment-là, une des petites filles m'a appelé : "Victor ! Viens là !" J'ai accouru vers elle. Cette petite fille n'a pas une situation familiale enviable. Je sais que son père et plusieurs de ses frères sont en prison, d'autres sont au Maroc et elle ne les voit jamais. Durant la colonie, elle a été assez peste et désobéïssante. Elle s'amusait parfois à montrer ses poux aux autres enfants, rien que pour faire son intéressante. J'étais donc accrouppi à côté d'elle. Elle avait l'air complétement perdue et, d'habitude si bavarde, elle n'avait pas ouvert la bouche depuis le début de cette soirée peu ordinaire. Elle m'a demandé :
"Victor ! Est-ce-qu'on va mourrir ?
_ Meuh, non !!! lui dis-je. Tu veux boire un peu ?"
Quelques secondes se sont écoulées avant qu'elle ne réponde "Oui !", avec un regard plein de malice. J'ai donc pris un gobelet en plastique, j'y ai versé un peu d'eau et je le lui ai tendu. Elle l'a repoussé vers moi. Je me disais : "Décidément, elle est toujours aussi impertinente..." Mais, en fait, je me trompais totalement sur son intention. Elle m'a dit : "Bois ! Il faut que tu boives, toi aussi." Je l'ai regardé avec des yeux tout ronds. Elle m'avait demandé de l'eau pour que je la boive. Mais, elle avait raison, cette gamine ! Moi aussi, il fallait que je boive. Moi aussi, la fumée me donnait soif et me fatiguait. J'ai donc bu en la remerciant du regard. C'était gentil de penser à moi...

Ce souvenir reste toujours présent dans ma mémoire. Je l'ai peut-être mal exprimé mais j'étais très ému par ce geste... Je ne pense pas qu'il soit intéressant de détailler tout le reste de la soirée. Je raconte juste rapidement la fin. Finalement, le feu a été éteint vers 21h00. Les pompiers sont venus nous voir pour vérifier l'état de santé des enfants. Ils allaient tous bien. Le châlet voisin d'où est partie l'incendie accueillait, lui aussi, une colonie. Il a été complétement détruit mais il n'y a eu aucun blessé. Les enfants ont donc pu retourner dans leur dortoir malgré le fait que le courant ne soit pas encore rétabli. Pour une fois, mon dortoir de garçons n'a pas fait de chahut avant de se coucher...

Ecrit par bobfish, le Vendredi 16 Janvier 2004, 22:04 dans la rubrique " Bobfish".

Commentaires :

ptitetsu
ptitetsu
20-01-04 à 18:05

C'est tout mignon... J'aime bien ce genre d'histoire... C'est dans des moments comme ça que tu sens ton coeur qui "déborde" (Tu sais, cette sensation bizarre, comme de la joie qui se répand...). Merci de nous l'avoir fait partager, Vic!

:)


 
bobfish
bobfish
20-01-04 à 18:44

Re:

Oui, c'est tout a fait ce sentiment que j'ai ressenti, Ptitetsu! Je suis content d'avoir réussi à le "transmettre". Je trouve ça vraiment beau cette solidarité qui est née dans un moment de panique...

 


Version  XML  - Cette page est peut-être encore valide XHTML1.1 et CSS sans tableaux.
Thème inspiré par Bryan Bell.